Kult the Forbidden
2025-03-18
À propos de Kult
Avant d’écrire sur le supplément en question, je dois parler de Kult lui-même. Je divulgache, vous voilà prévenus. Si cela ne vous va pas passez directement à la partie suivante.
La base du jeu
Kult c’est un jeu que j’adore et que je deteste en même temps. J’aime beaucoup son thème, l’idée que la réalité est cachée, les concepts sur lesquels il repose, les Principes. À mes yeux, Kult a toujours été une expérience Lynchéenne. Le voile de la réalité va apparaître et les PJ vont réaliser qu’ils ne voient que peu de choses. L’occulte est partout, la réalité craque sous leurs yeux, et énormément de choses codifiées les entourent sans qu’ils n’en ait conscience au début de l’aventure. C’est un Nephilim, mais sans le rève, sans la beauté du monde occulte, c’est tout l’inverse même : la recherche du réel, de la nature du monde, de l’âme, de soi, tout ceci va salir les protagonistes. Quelque chose va les mettre sur la piste, ce sera vraisemblablement traumatisant, et la suite ne va rien arranger, jusqu’à la découverte finale, ou ils comprendront que tout a toujours été faux et que s’ils ne sont pas seuls, ceux qui ont pris au piège les Hommes n’ont rien fait du royaume qu’ils avaient entre les mains - si ce n’est maintenir l’Illusion en essayant de prendre le contrôle des pensées des humains prisonniers. Mais tout cela en jeu, on ne va se poser la question que très tard si on se la pose.
On aura aucune explication vraiment intéressantes sur la raison qui fait que les Archontes maintiennent l’Illusion, ils veulent garder le pouvoir, OK, merci, mais pour en faire quoi, qu’est ce qui dans l’Univers de jeu va plus loin que maintenir la prison en place (pour les Hommes comme pour les Déchus, voir plus bas), et bien que nenni on se démerdera bien fort pour l’imaginer. Alors ce n’est pas bien grave en soit en réalité. Mais quand on s’est ingurgité tout le lore verbeux du livre de base, c’est un peu décevant malgré tout. Toutefois, il y a fort à faire avec ce qui est donné.
Je n’ai qu’une seule expérience de Kult, c’est la Madone Noire, le début car la mère de mon épouse est décédée au milieu de la campagne et donc je n’avais pas l’envie de jouer à ce moment là. Mais la sensation était là, insufflée, pour longtemps, c’était en 2016, et il est d’ailleurs tout à fait vraisemblable que le jeu résonne fort en moi vis à vis de ce deuil. En tout cas, cette sensation de voir un voile se froisser, que le naturel présentait quelque chose de factice, de froissable, avait été bien rendue par le groupe. Nous jouions avec Kult v2, et des moments donnaient cette sensation de pénetrer le patio de la Black Lodge, c’était à la fois dérangeant et exaltant.
Les modalités de jeu
Kult est proposé comme un jeu pour jouer à la limite, celle des PJ bien sur, mais celle des joueurs aussi. La V4 reste en théorie sur ce crédo, avec le contrat horrifique proposé afin de savoir sur quelles limites jouer. Sachant, que le jeu peut produire des situations dérangeantes de plusieurs natures, toujours assez “extrêmes” dans leur réalisation. J’aime beaucoup ces 3 exemples de ce qu’on y trouve couchées sur RPG Review, qui reflètent bien selon moi la variété des situations qu’on peut proposer dans le cadre du jeu :
‘The nepharite pulls her clothing aside to reveal her glistening sex. You’re struck with the strong desire, a lusty pull, to put your tongue on the moist slit, to be permitted to kneel in front of her, to please and worship her.’
‘You feel your newborn son’s warm, soft skin. You lift him up and he babbles and coos happily, unaware of what is about to transpire. You start walking towards the oven, your feet betraying you with every step.’
‘It starts with a stabbing pain in the bowels. Your stomach slowly swells to an unnatural size. You break into a cold sweat, and your bowels and bladder empty just to make room. A grotesque, wormlike creature, as big as an arm, starts to push its way out through your rectal opening. It sings and hums with a hundred tiny mouths.
Voilà. Évidemment, ces exemples sont extrêmes d’une certaine façon, et si aucun ne me donne envie ainsi, c’est ce qu’ils représentent qui me fais dire qu’ils sont malgré tout représentatifs du jeu : ils présentent : l’apex d’une scène, individuelle dans ces cas là (mais il s’agit d’un jeu collectif), qui révèle un niveau d’intensité élevé par rapport à beaucoup de JDR qui se prétendent horrifiques, dérangeant. Cela fait partie de la proposition du jeu : il y aura de la perte de contrôle, et elle sera très rude. Mais ce n’est pas tout. Pour citer à nouveau le livre de règles, il y a ce passage sur l’Illusion qui m’a marqué et qui pour moi fait partie de l’expérience attendue de l’éveil :
Our families, our friends, our place in society, and our roles in the community are like cement around our feet, dragging us down to the ocean floor. We’re instilled with the false conception of being responsible for each other, that we belong together in the prison created for us. Those who realise this is untrue break free. Those who wish to awake cut their ties with a vengeance, whether that is by no longer returning phone calls or actively destroying the ones they love. This deed in itself encourages the Illusion to crumble.
Se retourner contre les siens, détruire ce que notre personnage aime, ou simplement ce qui le lie au monde, ceci fait partie intégrante du déchirement du voile. Dit autrement, il ne s’agit pas juste de jouer Play-to-lose, il s’agit de réaliser des actes immoraux, des vrais, bien loin des murder-hobos sans sens, avec ou sans contrôle, pour pouvoir avancer dans l’arrachement des rideaux de la Black Lodge. Les trois examples donnés plus haut sonnent différemment une fois qu’on a cela en tête. Le premier et le dernier exemple ressemblent à mes yeux à des facilités pour s’extraire à cette règle pas bien mise en avant dans le livre de base. Le second, en revanche, a toute sa place dans une partie de Kult. Et si on est impliqué émotionnellement, ce qui me semble suggéré dans l’expérience de jeu, ce genre de scène est choquante, pour le joueur. Ce n’est pas un jeu facile, ni un jeu accessible. C’est un jeu qui a pour thème de rester un moment sur ses limites pour les franchir (pas nécessairement les dépasser.) Et le fait que le jeu, au travers du choix des Archontes qui vont dominer le segment dans lequel se déroule la campagne, confient au MJ les clés de Principes qui s’affrontent, va permettre une personnalisation assez forte dans l’horreur personnelle que vont traverser les PJ.
J’ajoute qu’on est incité à voir de la misère humaine, à jouer du drama et pas du drama de type Pasion de la Pasiones, non, aussi bien dans les situaitons suggérés que les lieux ou les plis de l’Illusion se remarquent, rien n’est gai ni fun en soit. Ce qui n’est pas un mal du tout, comprenons nous, cela va donner des situations intéressantes, nourrir de la fiction et ancrer les personnages dans ce qu’ils vont devoir transgresser, et cela fourmille de détails et d’idées pour le MJ.
Bref, il faut y jouer avec des outils de sécurité, et surtout des gens de confiance. Mais ça j’y reviendrai en conclusion.
Enfin ça c’est que j’avais en tête en lisant le fluff gigantesque du jeu (et vraiment sur la partie imagination, il y a de quoi jouer des années avec juste le livre de base, via les cultes, les PNJ fournis, les thèmes etc). Mais le système m’a donné un sentiment désagréable : Il faut aussi choisir dans quel mode de jeu on va jouer. Veut-on s’éveiller, ou l’être préalablement vis à vis de l’existence de l’Illusion. Et là dessus, je trouve la v4 plus que décevante : Kult propose de devenir l’Illusion de sa proposition. Sans revenir sur le sujet de l’adaptation en PBTA en soit, sans parler de la sécurité émotionnelle en jeu qui est un débat qui revient souvent (à raison,) au delà de tout ça, il y a quelque chose qui me déplait (qui est tout à fait dépassable notez bien, mais quand même.)
Il y a des tas de profils (l’agent, le carriériste, la personne brisée, le criminel, etc) et tout à la fin, on se prend le profil de l’endormi (le Dormeur en VF je crois) en pleine tête qui n’aura aucune spécificité. C’est à dire que si vous jouez un flic qui n’est pas conscient de l’Illusion du tout, vous aurez un sombre secret, vous aurez des désavantages (des cauchemards, des addictions, bref de quoi donner du grain au MJ) mais 0 avantage, même pas relatif à votre profession. Du coup on est incité à jouer des gens pour qui l’Illusion se délite déjà beaucoup plus, et on perd absolument le “plaisir” de la découverte (et la découverte peut se faire de mille façon, il n’y en a pas qu’une, vraiment, c’est àa la force du jeu à mes yeux,) aussi violent puisse-t-il être. Je trouve cela vraiment dommage parce que d’un coup et bien ça devient un jeu occulte contemporain à la con avec un gros lore et on joue du surnaturel, un WoD un peu plus dark et cracra, et tout s’effondre à mes yeux.
C’est surement que j’ai des attentes qui ne correspondent pas au jeu, j’en conviens tout à fait, mais dans ma tête, donc vraiment plein d’a priori, avec une unique expérience de jeu, et bien tout me paraissait tellement loin d’un genre de Shaan+Nephilim à la con. Mais je ne pense pas être dans le faux dans mon impression. J’ai lu avant le livre de base v1 en anglois (que je ne possède plus), mais si on avait bien accès à un panel d’archétypes, les personnages étaient des lambdas qui allaient se prendre le mur de l’Illusion dans la gueule - dans leur voiture. Là on passe sur tout ce qui devait faire l’intérêt du jeu : l’Éveil. Parce qu’une fois qu’on a atteint ce stade, qu’on est plus endormi, le jeu perd son intérêt à mes yeux. Et ça ne veux pas dire qu’on peut faire une seule campagne et ranger le jeu dans le paradigme qui me plait, au contraire, il y a de quoi vivre des centaines d’histoires différentes d’éveil. Mais bref voici un peu de fluff, vous allez comprendre (ou pas) ce que je veux dire.
Un peu de fluff
Tout ceci est expliqué avec des éléments qui permettent de jouer avec, de créer des sandbox, des situations, d’imaginer la création des conditions de l’Éveil de PJ dans le livre de base. Lisez le comme un framework qui va permettre de rapidement tirer des fils d’une situation intiale décidée en session 0 pour amener les PJ.
Les Principes (traduction au rabais, je ne suis pas certain que le mot colle tout à fait,) notamment, sont intéressants car ils vont permettre de façonner la direction de l’ambiance de la campagne en :
- Introduisant des manifestations des Archontes à travers des figures d’autorité, des systèmes de contrôle ou des illusions sociales.
- Utilisant Métropolis, Inferno et Gaïa comme des lieux de révélation où les PJ perçoivent l’effondrement de l’Illusion.
- Faisant apparaître des brèches dans la réalité qui montrent la vérité cachée du monde.
- Intégrant l’Éveil progressif comme une épreuve où les PJ doivent choisir entre l’acceptation ou la lutte contre l’Illusion.
Je préviens d’avance, des choses sont des traductions grossières ^^`
L’Humanité et l’Illusion
Autrefois, l’humanité était divine, résidant dans Métropolis, la cité primordiale. Cependant, nous avons été emprisonnés dans l’Illusion, un voile de mensonges conçu pour nous rendre mortels et nous faire oublier notre véritable nature. Cette Illusion a été mise en place par le Demiurge, un être tout-puissant qui a disparu depuis, laissant ses geôliers maintenir l’ordre en son absence.
L’Illusion crée l’illusion du temps linéaire, des lois physiques immuables et de la mortalité. Elle est renforcée par les structures sociales, les religions, les désirs et les peurs implantés en nous. L’objectif des forces supérieures est de nous maintenir dans l’oubli.
Les Archontes et l’Ordre Cosmique
Les Archontes sont les gardiens de l’Illusion. Ils ont été créés ou se sont élevés pour imposer leur domination sur l’humanité, chacun incarnant un Principe Cosmique qui influence la structure de la réalité.
Liste des Archontes et de leurs Principes
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Kether - Hiérarchie
- Incarnation du pouvoir absolu et centralisé.
- Favorise les gouvernements autoritaires et l’organisation hiérarchique stricte.
- Désire rétablir l’ordre perdu après la disparition du Demiurge.
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Chokmah - Sagesse Impitoyable
- Représente la logique froide et la connaissance sans compassion.
- Encourage une vision rationnelle et détachée du monde.
- Son influence se retrouve dans la science déshumanisée et les sociétés technocratiques.
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Binah - Structure et Conformité
- Force qui impose l’ordre par des règles rigides et la bureaucratie.
- Incite à la stagnation et à l’obéissance aveugle.
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Chesed - Miséricorde et Paternalisme
- Implique un contrôle par le soin et la bienveillance oppressive.
- Influence les organisations caritatives et les systèmes paternalistes.
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Geburah - Loi et Jugement
- Archonte du châtiment, de la discipline et de la loi intransigeante.
- Alimente les systèmes judiciaires totalitaires et la surveillance de masse.
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Tiphareth - Perfection et Allure
- Manipule l’humanité à travers l’image, la beauté et la séduction.
- Son influence se voit dans l’industrie de la mode, la publicité et le culte de l’image.
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Netzach - Guerre et Domination
- Encourage les conflits et l’agression pour maintenir le contrôle.
- Influence les militaires, les dictateurs et les organisations guerrières.
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Hod - Manipulation et Tromperie
- Influence les médias, la propagande et les illusions sociales.
- Sa présence se ressent dans les fausses nouvelles et la manipulation de masse.
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Yesod - Rêve et Désillusion
- Gère le monde des rêves et de l’imagination.
- Travaille en collaboration avec Tiphareth pour maintenir les esprits endormis.
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Malkuth - L’Illusion et l’Endormissement
- Initialement une servante fidèle de l’Illusion, elle a commencé à se rebeller.
- Désire réveiller l’humanité en la plongeant dans le chaos.
Ces archontes ont des équivalents dans les Déchus, mais je pense que je vais passer cette partie, sachez juste qu’elle permet de jouer avec d’autres Principes.
Métropolis – La Cité Divine Perdue
Métropolis est la demeure originelle de l’humanité, une cité cyclopéenne infinie, plongée dans un crépuscule éternel. Aujourd’hui en ruine, elle subsiste derrière les failles de l’Illusion.
- Ses rues ne suivent pas de logique humaine, formant un labyrinthe non-euclidien.
- Elle contient la Machine-Cité, un vestige de l’ancien ordre du Demiurge.
- Certaines créatures y survivent, vestiges du passé oublié.
Inferno – Le Royaume de la Souffrance
Inferno est dirigé par Astaroth et les Anges de la Mort. Il représente le reflet sombre de l’Illusion, un royaume de torture et de désespoir.
- Il est composé de citadelles sombres, de salles de torture et de paysages cauchemardesques.
- Les âmes y sont recyclées et transformées en énergie pour les Seigneurs de la Mort.
- Les prisons et lieux de souffrance du monde réel y sont reliés.
Gaïa – La Nature Sauvage et Primordiale
Gaïa est la force originelle du monde, opposée à l’Illusion. Elle cherche à reprendre ses droits en détruisant les structures humaines.
- Elle est responsable des catastrophes naturelles et des instincts primaires.
- Ceux qui s’y perdent peuvent devenir des bêtes sauvages, perdant leur humanité.
- Elle constitue une menace pour l’ordre imposé par les Archontes.
Le Monde des Songes – Limbo et les Royaumes Oniriques
Le Monde des Songes est un espace où la réalité est malléable, influencée par l’inconscient collectif.
- Il est en constante mutation et comprend de multiples royaumes oniriques.
- Les rêveurs peuvent influencer leur environnement mais risquent d’attirer des créatures cauchemardesques.
- Certains restent piégés dans ce monde après la mort, incapables de trouver la paix.
L’Éveil et la Libération
Certains humains perçoivent les failles de l’Illusion et commencent à s’éveiller.
- L’Éveil permet d’accéder à des pouvoirs surnaturels et de voir la structure réelle de l’univers.
- Ceux qui poursuivent cette quête deviennent des divinités renaissantes ou des abominations.
- Les Archontes et leurs serviteurs cherchent à empêcher cet éveil à tout prix.
La Mort et l’Après-Vie
La mort n’est pas une fin, mais une transition contrôlée.
- Les âmes sont souvent capturées par Inferno ou piégées dans des royaumes intermédiaires.
- Certaines, grâce à des rituels occultes, échappent à ce cycle et atteignent la transcendance.
Et donc ?
Voilà en gros, la trame du jeu. Il y a plein d’éléments jouables et c’est cool, mais ce qu’il y a d’encore plus cool, c’est que on ne prend ça que par le bout d’une ficelle quand on joue l’Éveil. Une campagne avec un plus gros enjeu peut certainement être fun, mais d’un coup cela nécessite plus de travail, et vraiment dans ce cas je me dis : à un moment ça va ressembler à du Supernatural plus gore et plus extrème, j’ai du mal à croire que les éléments qui sont là pour créer de l’angoisse ne vont pas juste de venir des agrougrous cracra sans sel, avec un vague motif biblique derrière pour dire.
Alors qu’en restant à cette surface, et en intégrant quelques PNJ ou factions données dans le livre et en me basant sur le groupe créé par les PJ, je suis sur que j’atteindrai bien mieux le sentiment de perdition recherché. Mais après les gouts et les couleurs, hein, on est d’accord, ça se discute peu.
The Forbidden
Ah oui, j’ai presque oublié ! Je voulais parler d’un supplément initialement, The Forbidden. ALors je susi très mitigé et j’ai la forte impresison de m’être fait flouer. Bah j’en parle la prochaine fois, là je parle Pax Elfica. Et c’est cool, c’est une campagne sympa à mener malgré ses défauts.